14 février 2006

Le professeur de chimie

Le professeur de chimie nous accueillit le jour de la rentrée par 4 heures de cours consécutifs, qui nous mis d’emblée à plat.
Cet homme avait une diction hachée, hésitante, qui obligeait l’auditoire à maintenir son attention en permanence. Son ton était plutôt monocorde, mais pouvait s’emballer dans une sorte d’accès de colère quand il était dérangé. Son débit s’accélérait alors et l’on voyait immanquablement son regard se focaliser sur deux étudiants qui bavardaient. Si ceux-ci cessaient leur discussion, le ton et le regard se calmaient et le débit reprenait son rythme hésitant. Si par malheur les étudiants ne s’apercevaient pas de l’attention qui leur était portée par le professeur, et à vrai dire par l’ensemble de l’amphithéâtre qui voyait se nouer le minuscule mélodrame, alors une sorte d’explosion verbale les ramenaient à la réalité. Le professeur hurlait leur nom et les deux élèves se retrouvaient cloués au pilori pendant de longues secondes d’un silence assourdissant. Par cette méthode, le professeur maintenait l’ordre dans son amphi surpeuplé.
Dans la majorité de ses phrases, il utilisait le mot « excessivement ». Ainsi, le mélange hydrogène-oxygène était-il « excessivement explosif » : une détonation violente nous fit sursauter à la suite de cette annonce. En effet, il avait approché ledit mélange d’une flamme, provoquant l’explosion. Mais que certains exercices qu’ils nous donnaient fussent « excessivement faciles » méritait réflexion. De même, la découverte par tel ou tel savant du XIXème siècle d’un principe chimique « excessivement important » nous laissait froids.
Il gardait la distance avec les étudiants, ne s’autorisant guère à nouer une quelconque relation avec eux. Il les vouvoyait systématiquement. Aussi je me sentis particulièrement fier quand il me remis un devoir que j’avais « excessivement bien réussit ».

Stage d’écriture « Ecrire la fiction », 14 février 2006.
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