18 février 2006

Kati

Allongée sur son lit, Kati observe Matthieu, immobile, nu, endormi, dans la pénombre. Elle pense que ce petit Français a le temps. Pas elle. Atteinte d’une maladie héréditaire du sang, elle sent à 25 ans ses forces qui diminuent déjà. Elle l’a mise dans son lit parce qu’il lui plait beaucoup. Comme tant de garçons, il est lent à comprendre ses propres sentiments. Elle va s’occuper de lui. Le week-end prochain, elle l’emmènera faire du ski de fond. Il y a tout plein de forêts pour ça autour d’Helsinki. Ils prendront le train. Juste avant, ils achèteront des harengs et du pain, pour le pique-nique. Kati n’aime pas les harengs, mais Matthieu fait une fixation sur les harengs depuis qu’il arrivé à Helsinki. Elle ne veut pas le décevoir. Dans le train, ils regarderont ensemble le paysage enneigé. Ils descendront dans une petite gare en pleine forêt. Elle l’aidera à chausser ses skis, il est si maladroit, si orgueilleux. Elle ira doucement. Il est plus fort qu’elle bien sur, mais maladroit. Elle, elle se sent plus faible qu’avant, mais elle a encore de l’énergie. Elle l’emmènera au bord d’un lac qu’elle aime. Elle lui montrera son coin préféré, à l’écart des promeneurs. Ils passeront un long moment au soleil, appuyés à un tronc d’arbre à manger des harengs, à se jeter de la neige ou a s’embrasser. Elle aime le mot français, « embrasser » qui veut dire entourer Matthieu de ses bras et poser un baiser sur ses lèvres.

Elle ne lui parlera pas cette fois du chalet de son père à la campagne pour les vacances de printemps. Pas encore. Quand ils repartiront, elle le défiera et il fera tout pour la doubler. Il arrivera en premier à la gare, il sera content. Dans le train du retour, il lui parlera de Paris, de l’Anjou, qu’elle aimerait tant connaître. De sa mère, peut être. Et le soir, chez elle, après l’amour, il s’endormira, et elle, elle le regardera. Fatiguée, épuisée. Mais heureuse.

Atelier « écrire la fiction », 17 février 06

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