14 novembre 2006

J’avais pris une femme de ménage

« J’avais pris une femme de ménage », dit l’un des deux flics qui bavardaient et se foutaient bien de moi, derrière ma grille.

Moi, j’avais l’impression d’avoir un zoom géant sur les yeux, en avant, en arrière, en avant, en arrière. J’étais tout juste assez conscient pour savoir que j’étais bourré comme un coin, et je devais m’agripper fermement à la grille pour que le monde arrête de tanguer.

Le gros flic de droite, je le reconnaissais. C’était le flic à vélo qui m’avait ramassé dans la rue, alors que je m’étais cassé la figure en essayant de rouler sur le mien, de vélo, tandis qu’il était toujours attaché à la grille du square. Il portait un casque de cycliste, et vu de par terre, il ressemblait à un œuf avec un flic dessous. Il m’avait soulevé gentiment, mais c’est quand je lui ai repeint les chaussures qu’il s’est fâché. Il m’a fait marcher jusqu’au poste et il m’a enfermé. A présent, il discutait tranquillement avec l’autre, un maigre à casquette de flic. Moi, j’appelais, mais ils ne me répondaient pas, trop absorbés à parler repassage et balais-brosse. Ce qui devait arriver arriva : je vomis pour la seconde fois sur les chaussures du gros, à travers la grille. Il m’engueula copieusement, et passablement abattu, je lâchais la grille pour aller m’allonger sur l’espèce de bas-flanc qui occupait un mur de la petite cellule. Je sombrais instantanément.

Le lendemain, je le réveillais dans la même position, avec un mal de crâne comme si on m’avait enfoncé un clou long comme ça dans le ciboulot. Et même toute une boîte de clous longs comme ça. Il me fallut une bonne demi-heure pour que le flic de service – pas un de ceux de la nuit, un nouveau à casquette – accepte de m’ouvrir, me fasse remplir une déclaration, et me relâche dans la nature, enfin sur le boulevard, à quelques 100 mètres du square où je retrouvais mon vélo. Enfin, pas tout mon vélo. On m’avait piqué ma selle. « Ah ! Les salauds ! », lâchais-je aux pigeons du square, qui me regardaient d’un œil rond, avec ce petit mouvement de cou caractéristique des pigeons qui se disent : ce type s’est fait piquer sa selle. De dépit, j’allais m’affaler sur le banc. Je retrouvais par terre la bouteille de whisky que j’avais vidé la veille au soir. « Eh ben, », dis-je aux pigeons, « maintenant qu’elle est partie, il va falloir que je trouve un femme de ménage ».

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